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La voiture électrique est-elle en crise en Europe ? Oui à Rome et à Berlin, non à Paris et à Madrid. Voici ce qui se passe

Le dernier sommet du G7 Environnement à Turin l’a réitéré une fois de plus : « La technologie clé pour la décarbonation du transport routier est l’électrique ». Pourtant, sur le continent qui s’est fixé les objectifs les plus ambitieux en matière d’abandon des vieux moteurs à combustion, la transition vers l’électrique s’avère plus lente que prévu. Avec un règlement approuvé en 2023, l’Union européenne a ordonné l’arrêt de la vente de voitures neuves essence et diesel à partir de 2035. Un objectif ambitieux, sans aucun doute, mais qui pour être atteint nécessite un taux de croissance encore plus élevé que celui prévu. nous l’avons vu jusqu’à présent. Les données de l’Acea, l’association des constructeurs européens, révèlent que plus d’un million et demi de voitures électriques ont été vendues en 2023, soit une hausse de 37 % par rapport à l’année précédente. En pourcentage, 14,6 % des véhicules vendus dans les pays de l’UE l’année dernière étaient électriques.

Données de ventes en Europe

Un examen plus attentif des données révèle que les 27 États membres ont enregistré une augmentation des ventes de voitures électriques par rapport à 2022. Huit pays de l’UE (Belgique, Bulgarie, Chypre, Danemark, Estonie, Finlande, Grèce et Portugal) ont même enregistré une croissance supérieure à 100 %. . Le maillot noir revient à l’Allemagne, le plus grand marché européen, qui peut encore compter sur une croissance à deux chiffres par rapport à l’année précédente (+11,4%). Il y a cependant un facteur qui suscite des inquiétudes : la forte croissance enregistrée en 2023 ne se répète pas cette année. Au cours des trois premiers mois de 2024, révèlent également les données de l’Acea, les immatriculations de nouvelles voitures électriques en Europe n’ont augmenté que de 3,8 %. Parmi les pays de l’UE, 15 ont enregistré des chiffres en hausse, tandis que les 12 autres ont vu leurs ventes diminuer. Parmi les grands marchés, ce sont la France et l’Espagne qui ont le plus progressé, avec respectivement +10,9% et +7,7% par rapport au premier trimestre 2023. L’Allemagne et l’Italie ont en revanche chuté à -14,1% et -18,5 respectivement. %.

ACEA | Ventes de voitures électriques dans les pays de l’UE en 2023 (à gauche) et au premier trimestre 2024 (à droite)

Une crise en vue ?

Bref, les données sur les ventes de voitures électriques en Europe continuent de croître. Le problème est qu’ils le font à un rythme décidément trop lent par rapport aux objectifs fixés pour 2035. Cela se confirme également par les difficultés de certains constructeurs automobiles. En 2023, Volkswagen a supprimé 269 emplois dans son usine de Zwickau, en Allemagne, en raison de la « situation du marché ». En mars 2024, Stellantis a officialisé un arrêt d’un mois à l’usine de Mirafiori, où est également produite la 500 électrique. Autant de signaux qui, ajoutés aux données peu encourageantes sur les ventes du premier trimestre de l’année, soulèvent une question : la voiture électrique est-elle déjà en crise ? Selon Giovanni Sgaravatti, analyste au groupe de réflexion Bruegel et expert en politique énergétique, la réponse est non. « Alors que le nombre de voitures vendues continue de croître, le marché sort de la phase « infantile » et entre dans la phase de maturité. Il est normal que le taux de croissance ralentisse”, explique Sgaravatti.

L’importance des incitations

Deux raisons contribuent à expliquer pourquoi les ventes de voitures électriques en Europe peinent à décoller. Le premier concerne les incitations mises en place par les gouvernements. Tant que le prix des véhicules à batterie ne sera pas aussi compétitif que celui des véhicules à moteur, les incitations à l’achat continueront de jouer un rôle clé. En Italie, par exemple, en mars et avril, le marché des voitures électriques est entré dans une sorte de paralysie temporaire. La raison? Le report continu de l’entrée en vigueur des nouveaux Ecobonus, annoncés mais pas encore opérationnels, qui a convaincu de nombreux acheteurs potentiels de reporter l’achat d’un véhicule électrique en attendant les nouvelles réductions. «Les chiffres commencent à refléter clairement l’inquiétude sur le dangereux interrègne entre l’ancien et le nouveau système d’incitations plus avantageux», observait il y a quelques semaines Francesco Naso, secrétaire général de Motus-E. Une situation quelque peu similaire s’est également produite au Royaume-Uni, où certains constructeurs ont prévenu le Premier ministre Rishi Sunak qu’il y aurait une “crise des véhicules électriques” si son gouvernement ne réintroduisait pas des incitations à l’achat de voitures moins polluantes.

La présentation des premiers robots de la ligne de production électrique Fiat 500 dans l’usine de Mirafiori, 11 juillet 2019 (ANSA/Alessandro Di Marco)

Les erreurs des constructeurs automobiles

Il existe une autre raison qui pourrait expliquer la croissance inférieure aux attentes des voitures électriques : elle est liée à la difficulté de certains constructeurs automobiles à comprendre les évolutions du marché. «De nombreux constructeurs ont résisté à la transition vers l’électrique et en paient désormais les conséquences», déclare Sgaravatti. Le catalogue de Ford ne contient par exemple que deux modèles électriques : le F-150 Lightning (un pick-up) et le Mach-E (une berline). De plus, ce sont deux produits destinés à un marché haut de gamme, avec des prix de départ trop élevés pour de nombreux consommateurs. Il en va de même pour Tesla, qui, au cours des quatre dernières années, n’a introduit sur le marché qu’un seul nouveau modèle – le Cybertruck – avec un prix de départ de 80 000 dollars. En bref, sans options moins chères, la voiture électrique ne sera jamais une solution réellement abordable pour tout le monde. «Miser sur le marché haut de gamme, au lieu de se concentrer sur le marché milieu de gamme, pourrait s’avérer une erreur», observe Sgaravatti.

À la recherche de voitures plus petites (et moins chères)

Une grande partie de l’offre de voitures électriques est aujourd’hui destinée à un public disposant de bonnes ressources économiques. Ceci est également confirmé par une analyse de l’association Transport & Environnement, selon laquelle, entre 2018 et 2023, les constructeurs automobiles ont introduit sur le marché 66 modèles électriques de luxe ou de grande taille. Et c’est peut-être précisément le manque d’offre de modèles moins chers qui explique, au moins en partie, la désaffection de nombreux Européens à l’égard des voitures électriques. En Chine, explique Sgaravatti, “plus de la moitié des petits véhicules électriques sont moins chers que leurs concurrents à moteur, certains modèles étant vendus à 15 000 dollars”. En Europe, au contraire, les modèles dont le prix catalogue est inférieur à 25 000 euros se comptent sur les doigts d’une main. L’offre de voitures électriques plus petites et moins chères a permis au pays asiatique d’atteindre un niveau de pénétration du marché bien supérieur à celui des États-Unis et de l’Union européenne, où les constructeurs ont préféré se concentrer sur la production de SUV et de voitures de luxe. «Les constructeurs automobiles ont des marges bénéficiaires plus élevées sur les grosses voitures : 10/15% pour les SUV, contre 6/7% pour les petits modèles», souligne l’expert Bruegel. Un premier signe de repentir de la part des constructeurs automobiles vient d’Elon Musk, fondateur de Tesla, qui a annoncé l’introduction d’un nouveau modèle plus économique d’ici un an.

Présentation du Cybertruck de Tesla à Buena Park, Californie, le 1er décembre 2023 (dîner EPA/Allison)

Comment évoluent les ventes de voitures électriques dans le monde

Si l’on regarde le monde entier, la transition automobile vers l’électrique semble se dérouler à un rythme nettement plus rapide qu’en Europe. Ceci est confirmé par les données de l’AIE, l’Agence internationale de l’énergie : au premier trimestre 2024, les ventes mondiales de voitures électriques ont augmenté de 25 % par rapport à la même période de l’année précédente. Cette année, toujours selon l’AIE, plus d’une voiture sur cinq vendue dans le monde sera électrique. Les données relatives au premier trimestre 2024 s’ajoutent aux excellentes performances de 2023, où un total de 14 millions de voitures électriques ont été vendues, en hausse de 35 % par rapport à 2022. Pour comprendre la vitesse à laquelle le marché croît, il suffit d’élargir regardez les années précédentes. En 2018, seulement 2 % des voitures vendues dans le monde étaient électriques. Cinq ans plus tard, en 2023, ce pourcentage grimpe à 18 %.

La croissance de la Chine, le ralentissement du marché américain

Presque toutes les ventes de voitures électriques sont concentrées sur trois grands marchés : la Chine, l’Europe et les États-Unis. Mais c’est surtout le pays asiatique qui tire le secteur, avec 60 % des nouvelles immatriculations, contre 25 % en Europe et 10 % aux USA. Les projections de l’AIE estiment que d’ici la fin de la décennie, un tiers des voitures en circulation en Chine et un cinquième de celles en circulation en Europe et aux États-Unis seront électriques. Il faut cependant considérer que le marché américain, tout comme celui des pays de l’UE, a commencé 2024 avec le frein à main serré. Au cours des trois premiers mois de 2024, la croissance des ventes de véhicules électriques aux États-Unis s’est arrêtée à +2,7 %, bien en dessous des +47 % enregistrés au cours de la même période de l’année dernière. « Le marché américain a ralenti, principalement à cause de la baisse des ventes de Tesla et de ses trois grands (Ford, GM et Stellantis). À cela s’ajoute l’installation de bornes de recharge, qui a été plus lente que prévu, ce qui a contribué à décourager l’achat de véhicules électriques”, explique Sgaravatti.

AIE | La croissance du parc de voitures électriques dans le monde ces dix dernières années

Les risques d’une marche arrière vers l’électrique

Enfin, il reste un dernier facteur à prendre en considération lorsqu’on discute de l’avenir des voitures électriques : la politique. Ces dernières années, la transition du secteur automobile vers des véhicules moins polluants est devenue un enjeu de campagne électorale. Les Verts et les partis progressistes font pression pour abandonner les véhicules à moteur, tandis que les groupes politiques les plus à droite freinent la transition. Identité et Démocratie, le groupe politique du Parlement européen dont fait partie la Ligue, demande par exemple d’abroger le règlement approuvé l’année dernière qui impose l’arrêt de la vente de voitures neuves essence et diesel à partir de 2035. « Ce serait une situation de marché dévastatrice et impliquerait probablement un nouveau ralentissement de la production interne de véhicules électriques en Europe”, observe Sgaravatti. Il en va évidemment de même aux États-Unis, où se tiendront les élections présidentielles en novembre. «La mobilité électrique est clairement l’avenir, tant en Europe qu’ailleurs, la question – insiste l’expert de Bruegel – est de savoir si nous voulons ou non sauver une partie de notre industrie automobile en encourageant l’électrification».

Une usine de voitures électriques BYD à Changzhou, province du Jiangsu, Chine, 14 novembre 2023 (EPA/Alex Plavevski)

Photo de couverture: Temps de rêve/Tom Wang

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