Éditeurs de caractères (mobiles) du Piémont à la Sicile

« Je trouve mes moments de consolation le soir en contemplant dans ma bibliothèque ces quelques exemples de perfection, comme certains Bodoni parmi les moins tape-à-l’oeil et les plus secrets. Maintenant, dans la catégorie des beautés rondes, j’ai un nouvel individu » : ainsi le philologue Gianfranco Continigéant de la critique européenne, remercia dès l’été 1946 l’imprimeur Tallone pour le don d’une de ses éditions limitées duAnge par Valéry. Il témoigne du caractère unique de cette industrie de l’édition qui privilégie les savoir-faire manuels anciens et l’absence totale d’industrialisation, produisant des livres tels qu’ils ont été imprimés pour la première fois. Gutenberg Et Manuce il y a plus de cinq cents ans.

Aujourd’hui encore, il existe des endroits où les pages sont composées de caractères mobiles et ce sont ces lettres en alliage de plomb, d’antimoine et d’étain qui s’impriment directement sur les feuilles sans utiliser les plaques du système offset moderne, dans lequel la plaque encre un caoutchouc. rouleau qui à son tour imprime le papier : les caractères mobiles sont un retour aux origines que l’on trouve actuellement dans de rares coins d’Italie, si l’on considère les maisons d’édition qui le font pour le travail et donc non sous contrat avec des imprimeurs. L’un de ces véritables éditeurs à caractère (mobile) se trouve à Alpignano, non loin de Turin : au numéro 9 de la via Diaz, une porte enferme un bosquet pour défendre un bâtiment auquel on accède depuis une allée interrompue par les rails d’une locomotive solitaire aimée. par Pablo Neruda.

Qu’est-ce que le prix Nobel chilien a à voir avec ce coin de la Vallée de Suse ? Ici tout est né dans la maison de campagne de l’épouse du peintre et portraitiste César Tallone. Au début du XXe siècle, ils emmenaient en vacances leurs enfants, dont Alberto, qui s’initia au théâtre avec Paola Borboni, puis il devient partenaire de Walter Toscaninile fils du chef d’orchestre, dans une librairie de Milan où il vend des éditions limitées qu’il décide ensuite de réaliser lui-même, arrivant à Paris en 1931, muni d’une lettre de Sibilla Aleramo. Il va au magasin de maître Maurice Darantière (anciennement imprimeur à Dijon de l’édition originale deUlysse De Joyce recherché par Plage de Sylvie) qui lui apprit à composer des volumes toujours à caractères mobiles comme un imprimeur du XVIe siècle.

Lorsqu’il décide de rentrer en Italie avec l’atelier parisien repris par le maître, il s’installe dans la maison familiale aux côtés de son frère, passionné comme lui par les trains, et ensemble ils créent une ligne ferroviaire de quelques dizaines de mètres, avec un bateau à vapeur à charbon disponible pour l’allumage de ses amis, dont Neruda, le fils d’un cheminot, lorsqu’il venait lui rendre visite dans les années 1960, renouant avec ses années françaises. !Traiter les moyens mécaniques et enseigner l’art à ceux qui veulent le pratiquer” était l’intention de Bodoni dans son manuel typographique et c’est ce qu’il fait. Enrico Tallonefils d’Alberto, avec les trois enfants de la troisième génération qui se sont lancés dans l’entreprise, au nom de l’esthétique éditoriale.

“Un monde ordonné est un monde imprimé” : il le croyait Vanni Scheiwillerpassionné par les livres d’art produits avec l’imprimerie ancienne, qui connut un grand renouveau dans les années 1900 par ceux qui s’inspirèrent des éditions anglaises William Morris. Parmi ceux-ci, c’est Hans (John) Marderteig qui opère entre la Montagnola suisse et Vérone, où il s’installe en 1927 Arnoldo Mondadoriou appelez pour créer l’édition nationale de D’Annunzio. Après la guerre, il introduit l’art de la presse sur le marché de l’édition et crée une imprimerie, appelée Valdonega d’après le quartier dans lequel elle se trouve, basée sur des machines à composition mécanique Monotype et des cylindres à plat Johannisberg.

Dans le Milan d’aujourd’hui, l’acronyme Henry Beyle, inspiré du nom de naissance de Stendhal, privilégie les caractères monotypes, même si le « y » (c’était Henri) est une « faute de frappe intentionnelle », comme le dit Vincenzo Campo, professeur de lettres siciliennes et petit Editeur milanais, rappelant que «Henry Brulard était le nom derrière lequel l’écrivain français avait raconté son enfance». Le choix de textes courts composés en édition limitée sur du papier de qualité intact, à découper à la main lors de la lecture, a suscité une attention envers ces produits de valeur. Et comment oublier les plaquettes Tournesol créées dans la région de Catane Valverde par le poète Angelo Scandurra. Il a écrit une fois Stefano Salis « Si le livre a un avenir, il viendra d’un passé lointain ».

Ensuite, il y a “le boulanger des éditeurs, le seul qui imprime le même jour” : c’est ainsi que Vanni Scheiwiller définissait le poète typographe des éditions Pulcinoeditore car les livrets d’Alberto Casiraghy, toujours huit pages en trente exemplaires avec une planche d’artiste à l’intérieur, ils sont conçus, composés, imprimés et reliés entre le café du petit-déjeuner et le thé de cinq heures. Dans la maison-atelier d’Osnago, en Brianza, à 30 km de Milan, il déambule parmi les plombs, les papiers, les huiles lubrifiantes et les miroirs sur ses vêtements. un alchimiste de l’imprimerie, un “art ancien et simple” selon Casiraghy, pour qui “la maison de la poésie n’aura jamais de portes”. Presque comme celle des éditions Pulcinoeditore et d’autres éditeurs à caractères mobiles l’avaient déjà capturée en mots écrits. à la mort de son ami Tallone : « Dans vos livres, petits châteaux de l’homme, la beauté et la clarté sont restées vivantes : la nuit n’entrera pas par ces fenêtres ».

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