Critique d’Anna

L’histoire de la lutte pour la protection du patrimoine sarde contre la fièvre spéculative est au centre d’Anna de Marco Amenta. La critique de Mauro Donzelli.

Elle erre aussi obstinée et sincère que son terrain, rochers et sable sur un plateau, entre l’arrière-pays à perte de vue et la mer quelques mètres en contrebas. Il ne pouvait avoir pour titre que le nom de son protagoniste, Annale film dans lequel Marco Amenta quitte sa Sicile pour rendre hommage à la Sardaigne, avec une histoire d’amour absolu, entre revendication anthropologique et résistance à une énième volonté de progrès, sous la forme d’une petite et irritante spéculation immobilière sous le chantage de l’emploi pour tous. Les petites communautés confrontées à une histoire difficile sont souvent au centre de l’histoire du réalisateur sicilien, qui confie cette fois entièrement son défi à son protagoniste, joué avec beaucoup d’empathie et libre de toute convention par Rose Aste. Enracinée dans sa petite réalité, elle a vécu quelques années à Milan, avec son mari, dont elle s’est séparée, en se rebellant contre les coups et l’oppression qui émasculaient la liberté qu’elle réclamait en retournant dans son petit village de Sardaigne.

Elle revient marquée d’une lettre écarlate cependant, celle d’une femme qui s’est permise de s’affranchir de la domination patriarcale.. Il a pourtant repris la petite entreprise de son père et se consacre chaque jour à l’élevage de moutons pour produire du fromage et de la ricotta qu’il revend ensuite au village. Elle est aussi sauvage que son petit bout de terre soudain revendiqué par une nouvelle station balnéaire, dont la construction commence du jour au lendemain et finit par assiéger sa maison. Des monstres mécaniques qui obligent Anna à se battre, à une révolution qui sent la restauration d’un système basé sur des lois anciennes et surtout sur le respect de la parole donnée.. Au-delà du décor unique d’une Sardaigne aux contradictions originelles, Anna est une histoire classique de rébellion contre l’arrogance du plus fort, inspirée d’une histoire vraie.. C’est avec l’argent que la grande entreprise veut convaincre la jeune femme de reconstruire sa vie ailleurs, en laissant place à un hôtel et une piscine, une vue sur la mer et “des centaines d’emplois” si tentants pour ses concitoyens eux-mêmes. Comment pouvez-vous lui en vouloir ?

Celui d’Anna est un combat quelque peu luddite et très anarchique, qui, en se révoltant contre la violence d’une prétendue modernité, tente désespérément de surmonter celle subie à l’intérieur de la maison par ceux qui étaient censés l’aimer et la protéger.. C’est une histoire de violence domestique et communautaire, d’entêtement contre tout et contre tout le monde, même le seul allié, l’avocat qui tente de l’aider, envers qui on ne peut s’empêcher d’éprouver du respect plutôt que de l’admiration. Un petit exemple d’un territoire laissé sans règles à la disposition de ceux qui, au fil des années, ont voulu le dévaster, sans parvenir à protéger la principale beauté, le véritable bien culturel de notre pays, son paysage. En ce sens, la bataille apparemment limitée de Anna devient le symbole – au féminin – d’une œuvre cruciale de protection nationale, géographique et sociale, personnelle et sexuelle.

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