la décision cataclysmique prise “avec Brigitte” et le soutien à l’extrême droite anti-UE

DE NOTRE CORRESPONDANT
PARIS – D’abord au gouvernement puis à l’Elysée, Emmanuel Macron a été tantôt un homme politique, plus souvent un héros romantique. Dix ans d’oscillations continues entre ces deux dimensions, ils ont produit, dans les meilleurs moments, un leader jeune et courageux, visionnaire et compétent.

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Dans les pires phases, comme celle que traverse Macron, le héros romantique en lui a pris le relais, transformant le président de la France, une puissance nucléaire et la septième économie de la planète, dans une sorte d’éternel adolescent enfermé dans l’envie d’étonner, comme s’il était revenu à l’époque de son arrivée à Paris, où il parcourait d’un pas vif les couloirs du lycée Henri IV, laissant flotter dans les airs ses longs cheveux et son manteau.

Et si l’idée d’envoyer des troupes en Ukraine pas de quoi impressionner le monde entier, le soir même de la défaite du 9 juin nous allons convoquer des élections anticipéeset nous nous exposerons à un autre coup, encore plus catastrophique, et nous ouvrirons les portes du pouvoir à notre vieil adversaire politique,Marine Le Pen, et on dira qu’on l’aura fait pour « redonner la parole au peuple », comme si un obscur dictateur avait été au gouvernement ces sept dernières années, et non Macron lui-même. Le président, abandonné par les Français, apparaît comme un amoureux qui détruit la maison de l’amour fini.

«Après sept ans, Les gens ne veulent pas vous donner un bon coup de pied au cul ? Bien sûr que oui. Et c’est ce qu’ils ont fait aux Championnats d’Europe le 9 juin », déclare Macron dans une conversation de près de deux heures dans le podcast. Génération Faites-le vous-même, dans lequel le président a révélé il y a quelques jours une grande partie du moment psychologique qu’il traverse. Ce besoin continu de parler, de s’expliquer, de rechercher l’amour de l’interlocuteur, émerveillé de trouver autant de Français capables de lui résister. Macron baisse le ton, se confie et revient sereinement sur son chemin. Celle qui l’a mené du lycée jésuite La Providence d’Amiens à Paris, à Sciences Po, puis à l’Ena, jusqu’au gouvernement avec Hollande puis à l’Elysée.

C’est un voyage, celui du provincial qui rêve grand, raconté mille fois dans la littérature française, par Lucien de Rubempré de Comédie humaine par Balzac a Madame Bovary de Flaubert qui est en fait «le livre que j’aimerais offrir à tous les Français, si je devais n’en choisir qu’un», dit Macron, complètement l’épopée contemporaine des « transfuges de classe » par Annie Ernaux et Édouard Louis. Même Macron, bien que fils de médecins et non d’une classe populaire comme dans le cas de Louis, se souvient de son arrivée à Paris – parce que la famille voulait l’éloigner de sa maîtresse Brigitte et scandale – et “J’avais l’impression de débarquer d’une autre planète”. Un peu ringard, non ? “Oui un peu’. Je n’avais pas les codes.”

“Ne pas avoir les codes”, c’est la malédiction de tout Français qui arrive à Paris, puis de tout Parisien qui se faufile dans les bons quartiers, puis de tout habitant des bons quartiers qui pénètre dans les cercles culturels et politiques.. Le syndrome de Caterina va en ville de Paolo Virzì, appliqué à l’Elysée. Mais Macron poursuit : « Et puis, à Amiens, j’étais le meilleur de l’équipe, et je jouais en Serie A. Soudain, à Paris, ils m’ont mis en Ligue des champions et je n’ai plus jamais touché au ballon. J’avais 16 ans et j’étais seul. Ces années m’ont beaucoup appris.”

Dans ces années-là en effet, le jeune Macron il a continué à appeler Brigitte pour la convaincre de quitter son mari à Amiens et de le rejoindre à Paris, seule contre le monde, voire faite pour conquérir le monde, ensemble. Cela n’a pas été facile, et Macron souligne aujourd’hui queSon image de « premier de classe » ne correspond pas à la réalité. «Par exemple, je n’ai pas pu entrer en Normale Sup», un obstacle qui pique encore.

Macron affirme avoir pris la décision du cataclysme «seul, comme toujours dans les moments les plus difficiles», et dans son cas « seul » signifie « avec Brigitte », celle qui est à ses côtés depuis l’âge de 16 ans. Aujourd’hui, Emmanuel a 46 ans et depuis le lycée d’Amiens, ils ont commencé à vivre beaucoup de choses ensemble.

L’idée de dissoudre l’Assemblée maintenant, sans attendre le probable vote de censure parlementaire en octobre, elle a germé dans « l’aile Madame » du Château (l’Elysée), celle occupée justement par Brigitte et l’édile Bruno Roger-Petit. Il y a un aspect intellectuel dans ce choix, l’influence de Christopher Lasch et de l’essai sur la rébellion des élites et la trahison de la démocratie, la volonté de combler d’un seul coup la séparation entre Elisée et les citoyens.

Mais il y a surtout le plaisir de se montrer comme un homme politique différent, qui ne se plie pas aux calculs. Tu vas me botter le cul ? Et maintenant, voyons comment vous allez. Un homme politique si différent qu’il a fini par privilégier l’extrême droite anti-UE, après l’avoir toujours combattue. Un héros romantique tenté par Révolutioncomme il voulait titrer son premier livre, toujours à mi-chemin entre Amiens et le monde, plus qu’un homme politique.

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