Dicker : « Je vais vous raconter l’origine de mes livres »

Dicker : « Je vais vous raconter l’origine de mes livres »
Descriptive text here

À vingt-cinq ans, Joël Dicker avait déjà écrit six romans que personne n’avait publiés, publié un roman que personne n’avait lu et écrivait le roman que tout le monde lirait et qui le transformerait d’inconnu en auteur à succès. : La vérité sur l’affaire Harry Quebert. Mais lui, comme le disait M. de La Palice, ne connaissait pas encore le succès. Et une question le torturait : serai-je un jour écrivain ? Les doutes ont augmenté lorsqu’il a fait lire à un ami les quelque six cents pages du manuscrit de Quebert : « Il a pris ce cadeau – dit Dicker entre une présentation et une autre de son nouveau best-seller – il a lu toute l’histoire et m’a dit : “Eh bien, c’est pas mal, mais c’est sacrément trop long : si on ne le divise pas en chapitres, les lecteurs vont mourir parce qu’ils ont besoin de respirer. Et toi avec eux.” J’avais écrit six cents pages sans interruption. J’ai compris que je devais faire quelque chose.” Dicker a compris quoi faire et a pris une décision bizarre, dont nous parlerons sous peu, mais pas avant de l’avoir dit dans la question de Tuttolibri en kiosque demain avec L’empreinte vous y trouverez un long entretien avec l’écrivain suisse, tout centré sur l’écriture, notamment son dernier roman, Un animal sauvage, édité par La nave di Teseo, évidemment en tête des ventes. Mais revenons à il y a quatorze ans. Dicker, vingt-cinq ans, ne savait toujours pas quoi faire de lui-même et de ce manuscrit infini et très lourd de 600 pages ininterrompues. «L’une des choses que j’ai essayé de comprendre à l’époque était ce que devrait être un chapitre. Pourquoi une partie de l’histoire commence-t-elle d’une manière et se termine-t-elle, en s’interrompant, d’une autre ? J’avais besoin de mettre quelque chose pour briser le récit et ce quelque chose devait être du temps, du rythme. Je suis batteur, je sais à quel point il faut du rythme dans une chanson. Un deux trois! Et le morceau commence, donnant à l’auditeur une indication sur le rythme à venir. Et donc mes chapitres : ils auraient dû donner aux lecteurs une idée du rythme du récit. »

Mais ce n’est pas suffisant. Dicker écrit cette intrigue qui parle de l’écriture d’un livre et des personnages qui se déplacent dans l’histoire de ce livre, à l’intérieur d’un livre. Il pense donc que ce serait peut-être une bonne idée, à vingt-cinq ans, d’insérer entre les chapitres des intermèdes qui lui dictent les règles d’écriture d’un roman. C’est-à-dire un livre, dans un livre, dans un livre. «Ces mini-chapitres – entre les chapitres – sur l’écriture en disent long sur ma façon d’écrire. Je me demandais ce que j’allais faire de ma vie. Je savais que je voulais devenir écrivain, mais il n’y a pas d’école pour devenir écrivain, cela ne s’enseigne pas à l’université. J’ai donc décidé d’écrire mes idées sur l’écriture en les plaçant au milieu du livre et en les construisant de manière à ce qu’elles ressemblent à une conversation entre les deux protagonistes, mais en réalité elles pouvaient aussi être prises individuellement et publiées séparément. J’ai décidé de le faire parce que je pensais tellement Harry Québert n’aurait jamais été publié.” Mais alors le génial éditeur Bernard de Fallois comprend combien vaut le manuscrit qui lui passe entre les mains et décide de le publier. La vérité sur l’affaire Harry Quebert. Et alors? « Et j’ai donc beaucoup réfléchi à la question de savoir si je devais jeter ces chapitres sur l’écriture. Parce que cela peut paraître très arrogant, très présomptueux, à vingt-cinq ans, d’entrecouper les chapitres de mon roman d’une sorte de traité d’écriture.” Heureusement Dicker ne les jette pas, le livre se vend à des millions d’exemplaires dans le monde et la force de ce très jeune écrivain qui pose son manifeste, sa déclaration d’intention littéraire, saute aux yeux. Tous les romans suivants sont des best-sellers dans le monde entier : Le livre de Baltimore, La disparition de Stéphanie Mailer, L’énigme de la chambre 622, L’affaire Alaska Sanders et aussi le premier écrit, Les derniers jours de nos pères, que personne n’avait remarqué lors de sa première publication et qui devint un nouveau succès. Plus de quinze millions d’exemplaires vendus dans le monde, ce qui n’est pas mal pour un garçon qui n’a pas encore quarante ans. Maintenant ce nouveau Un animal sauvagequi, rien qu’en Italie, a déjà dépassé les cent mille exemplaires et que Dicker présentera à la Foire du livre de Turin le 11 mai.

Parmi les règles qui ont fait le succès des livres de Dicker figurent la facilité d’écriture, la légèreté apparente, une légèreté calvinienne : « La légèreté est un point d’arrivée. Écrire n’est pas facile du tout, mais au final c’est très amusant. Et le plaisir rend justifiables tous les efforts, la douleur et la difficulté d’écrire. Je suis également convaincu que si la lecture est facile pour le lecteur, alors vous avez fait du bon travail en tant qu’écrivain. Il est très facile d’écrire des phrases compliquées, sophistiquées, avec des termes difficiles, très construits, mais beaucoup de travail est consacré à la légèreté et à la simplicité. Ce n’est pas facile de rendre simples les choses difficiles. »

Quel est le moment où vous avez l’impression de passer de la difficulté d’écrire au plaisir d’écrire ? «Quand je commence à écrire, je ne suis jamais sûr des personnages, de l’histoire, de l’intrigue, de l’endroit où je vais finir. Il y a beaucoup de choses à régler et ce n’est pas le moment de s’amuser. Mais vous savez que si vous travaillez dur, le plaisir viendra. À un moment donné, les nœuds se dénouent, les personnages s’emboîtent bien, les intrigues se mettent en place et on reconnaît à ce moment-là à quoi servait tout le travail effectué. C’est à ce moment-là que je ressens tout le bonheur d’être écrivain.”

NEXT 5 livres d’architecture et de design à lire en mai 2024