Autoportrait new-yorkais | Mangialibri depuis 2005, jamais de régime

Autoportrait new-yorkais | Mangialibri depuis 2005, jamais de régime
Autoportrait new-yorkais | Mangialibri depuis 2005, jamais de régime

Il ne se souvient même pas du moment où il a décidé qu’il pouvait se permettre de croire qu’il faisait quelque chose de différent. Vous vivez passivement toute votre vie et puis, un jour, vous décidez d’aller étudier à New York. Ignorant ce qui vous attend, pourrait-on dire. En réalité, plutôt que « d’inconscience », on peut parler d’indifférence. La Grosse Pomme, en 2008, à 23 ans, peut être destructrice. Surtout si vous étudiez la photographie, entouré de talents exubérants, et que vous vous limitez à vous photographier. Autoportraits. Vous ne pouvez tout simplement pas pointer l’objectif vers le visage de quelqu’un d’autre. A quoi cela servirait-il si ce sont vos façades que vous souhaitez voir ? Vos fenêtres fermées sont-elles celles dont vous souhaitez enlever les rideaux ? Vous n’êtes pas si différent de New York. Vous aussi, vous êtes épuisé, sale, corrompu. Pour payer la chambre dans l’appartement sordide que vous partagez, vous vous déshabillez pour d’autres artistes. Si on veut être honnête, à partir de ce moment-là, un homme vous a donné vingt dollars pour vous regarder vous masturber, vous avez compris que vous gagneriez plus ainsi. Craigslist est le meilleur endroit pour trouver des emplois comme celui-ci, et c’est là que vous avez rencontré Lou. Oui, il était foiré. Pourtant il était merveilleux, avec ses vêtements miteux et sa cigarette entre les dents. Il suffit de peu de temps pour tomber amoureux, décider d’emménager avec lui et finir par dépenser de l’argent en dîners, en jeux de hasard et en bières. Mais c’est ainsi qu’on veut se souvenir de ces années dures et violentes, où les nuits passées à ciel ouvert sur un banc de Central Park étaient plus nombreuses que celles passées entre les murs d’un appartement. Avec quelques pièces, vous pourriez aller à la laverie et, alors, qu’est-ce qui vous manquait ? Si vous aviez une chemise qui sentait bon, à New York, c’était suffisant. Cela n’a pas d’importance s’il n’y a même pas eu de point final. Peu importe si dans les photos que vous avez prises de vous-même, vous espériez, un jour, une vérité différente dans vos yeux et que celle-ci ne soit jamais arrivée…

Maurizio Fiorino, né à Bologne, s’installe à New York pour entreprendre des études de narration. Après Amour, Jésus, maintenant que je suis né Et MarcellusPublique Autoportrait new-yorkais. La référence à la ville dans laquelle vivait l’auteur attire immédiatement le regard : la même dans laquelle vit le protagoniste du roman. Pour être honnête, la survie du personnage est plutôt une survie mélangée. Nous ne connaissons pas le nom du garçon, mais nous savons tout le reste. Les pires aspects ne nous sont pas cachés : de la consommation de drogue à la prostitution, en passant par les périodes passées sans abri. Pourtant, on ne lit jamais la peur entre les lignes. Seulement la désolation, la solitude et le besoin inconscient de se voir dans quelqu’un d’autre. D’où l’attachement toxique à Lou, qui est également seul au monde. C’est aussi de ce même besoin d’autodéfinition que naît la tendance du protagoniste à vouloir photographier uniquement son propre visage. Dans un épisode important du livre, on lui demande, dans le cadre d’une mission universitaire, de photographier un ami. Le garçon se photographie. Il aurait pu faire semblant, arrêter un inconnu dans la rue et lui demander de poser pour lui, puis dire qu’il l’avait rencontré à on ne sait quel concert ou à la fête d’anniversaire d’amis communs. Et pourtant, ça ne marche tout simplement pas. Il se présente en classe avec une collection d’autoportraits, subissant la déception du professeur. Comment expliquer que c’est lui-même qu’il a besoin de voir ? Il ne peut pas le dire. Pour cette raison, il baisse la tête et accepte la défaite. C’est ainsi qu’il fait face à chaque situation difficile. L’âme du protagoniste est parfaitement restituée par l’écriture de Maurizio Fiorino, sans jamais la banaliser. Intime et sincère, la plume de l’auteur coule avec légèreté dans la ligne du « faire comprendre », satisfaisant les lecteurs les plus empathiques. Un roman qui laisse facilement ému, surtout pour ceux qui ont quitté leur foyer pour chercher une vie ailleurs.

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