Tous les films de Franco et Ciccio, une mémoire populaire insouciante et de masse dans le livre de Marco Giusti

Tous les films de Franco et Ciccio, une mémoire populaire insouciante et de masse dans le livre de Marco Giusti
Tous les films de Franco et Ciccio, une mémoire populaire insouciante et de masse dans le livre de Marco Giusti

Francociccisti, ou Francongrassiani, de tout le pays, levez vos antennes. Au Cinéma Ritrovato de Bologneentre un restauré Marlène Dietrich vendu à la manière lgbtq et unAlice Rohrwacher qui se moque de Pirandello (“J’ai décidé de faire un film muet depuis que j’ai découvert que Pirandello détestait les films muets”), voici deux espions très siciliens “qui venaient du semifreddo” ressurgissant entre les pages d’une œuvre qui est physiquement, et pas seulement, omnia.

Tous les films de Franco et Ciccio c’est le livre de Marco Giusti (éditions Bloodbuster) qui ferme les portes, les lueurs, les fissures restées ouvertes sur le célèbre duo comique sicilien qui s’est imposé commercialement dans les théâtres italiens dans les années soixante et s’est ensuite imposé comme l’iconographie d’un mémoire populaire insouciante et de masse. Un peu comme le problème habituel que le rire au cinéma en Italie, et pas seulement, a eu avec le concept de culture.

Un fait immédiat à retenir (page 67 du livre) : à partir du moment où ils ont commencé à apparaître ensemble dans leur premier film (Appuntamento ad Ischia, 1960) jusqu’aux environs de 1973, lorsque survint la première séparation (en 1984, ils revinrent à Kaos dei Taviani), ils a tourné 110 films pour un chiffre d’affaires total de 80 milliards. Une énormité. Surtout si l’on pense aux coûts de production très bas, menés par ceux de la prévoyante Fida. Pourtant, malgré l’apprentissage très humain et universel de la misère des artistes de rue avec littéralement un trou dans le cul (il y a l’anecdote de Ciccio avec sa culotte en laine qui, lors d’une tournée glaciale dans les Abruzzes à la fin de la cinquantaine, ne les emmènera pas pendant des jours), la popularité authentique et sincère parmi les gens et surtout parmi les enfants obtenue en faisant rire les gensFranco et Ciccio restent dans les archives de la mémoire aussi comme ces deux acteurs qui ont tenté de gagner en crédibilité dans le grand monde du cinéma italien, même dans le même genre de comédie mais comme Monicelli ou Risi, sans jamais avoir de réel succès.

Rappelons-nous encore, pour ceux qui ont oublié les journées passées notamment à la télévision, à les revoir dans les années 80 et 90 (l’écrivain a survécu à la varicelle en riant aux éclats de I due sansculotti) que la fortune de Franco et Ciccio était précisément celle de parodier le soi-disant grand cinéma, ou du moins les titres qui sont forts au box-office et qui se rapprochent littéralement d’un pouce des recettes. Deux mafieux contre Goldginger, 00-2 agents top secrets, Le bon, la brute et l’idiot, Une horreur, Séduit et arnaqué ne sont que quelques-uns des centaines de titres parodiques comparés aux grandes références de modèles d’histoires d’espionnage, aux westerns spaghetti ou aux , sacrilège, voire haute comédie (à son tour très rentable en recettes) vers laquelle les deux comédiens chercheront enfin, à partir des années soixante-dix, un point d’appui agissant pour ce souci individuel tout psychologique de vengeance socioculturelle (“le filtre de l’intellect”, Franco a expliqué dans une interview). Giusti le souligne d’ailleurs à plusieurs reprises.

Les critiques de cinéma – principalement « ceux du Nord » – ont déchiré pendant des années les films avec Franco et Ciccio. “Leurs visages stupides, leurs expressions faciales désagréables, leurs blagues stupides font un carton”. « Les riens les plus ignobles d’un sous-bois cinématographique aussi offensant que rempli de millions mal acquis ». Ce ne sont là que quelques-unes des premières que Giusti passe au crible les journaux, magazines et documents de l’époque. Alors que leurs films, souvent 4 ou 5 par an, se retrouvaient sur les deuxième et troisième circuits de visionnage, y restant jusqu’à une décennie, Franchi et Ingrassia étaient culturellement massacrés. Droite? Faux? L’histoire, les épisodes, les désaccords entre les deux témoignent qu’ils avaient besoin du rôle, du rôle, de l’espace en tant que protagonistes de « qualité ». Et pense juste, encore frais du Pinocchio télévision de Comencini, définitivement élevé au rang des visages espiègles du divertissement populaire, Ciccio est le premier à « trahir » en agissant pour Florestano Vancini dans Violence : cinquième pouvoir (oublié par la plupart), tandis que Franco cherche le chemin vers un début musical solo (inouï par la plupart).

Bien sûr, ils viendront L’exorciser pour Ingrassia e Dernier tango à Zagarolo pour Franchi, seul sur scène encore dans le sillage parodique au succès assuré, mais c’est l’alchimie du duo qui surgit de la poussière de la rue qui teinte triste et mélancolique comme dans un sujet zavattinien. A cet égard : bien comprendre à la fois la vocation de Franchi et d’Ingrassia en tant qu’enfants, l’équilibre du travail dans la formule dorée dans la salle (récitée comme un mantra Lucio Fulci, Lucio Fulci), et surtout la chronologie exacte des nombreuses séparations /réconciliation des deux, au lieu de parcourir Wikipédia sur votre smartphone, achetez le livre de Giusti et vous serez satisfait.

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