Le Courage de Blanche : critique du film de Valérie Donzelli

LAMOUR-ET-LES-FORETS-©-2023-RECTANGLE-PRODUCTIONS-FRANCE-2-CINEMA-LES-FILMS-DE-FRANCOISE_Photographe-Christine-Tamalet

Le courage de Blanche est un film français réalisé en 2023 par Valérie Donzelli. Le réalisateur est surtout connu en Italie comme interprète du film La guerre est déclaréenominé à l’Oscar du meilleur film étranger en 2012. Le titre original du film est L’amour et les forêtscomme le roman de Éric Reinhardt dont le scénario est librement inspiré et pour cette raison récompensé comme meilleure adaptation cinématographique aux prix César 2024. L’amour et les bois : une dichotomie qu’il est dommage de perdre en traduction (mais on sait que l’histoire des adaptations de titres en langue étrangère en italien n’est pas parmi les plus heureuses, il suffit de penser au cas de Si tu me quittes, je te supprime). D’un côté l’amour, de l’autre les forêts, dans une image qui rassemble toute une histoire. Si nous nous retrouvons à errer dans les bois, que ce soit physiquement ou psychologiquement, nous sommes seuls : l’amour est resté ailleurs et notre moi le plus profond avec lui.

Le courage de Blanche : une histoire universelle et singulière

Lorsque vous regardez un film sur la violence sexiste, vous avez toujours l’impression de l’avoir déjà vu. Parce qu’il n’y a que deux fins possibles pour les femmes qui en sont victimes, se retrouver ou se perdre complètement, et parce que l’histoire se déroule toujours, inévitablement, à travers une série de phases qui vont de l’amour à l’éloignement de l’être aimé. à l’apparition des premiers doutes de la conscience, ignorés par l’âme qui veut aimer, à l’émergence sans équivoque de la violence. Du conte de fées au cauchemar, sans pause de conscience aux différentes stations, sans passer par le départ.

Pourtant, tout n’a pas déjà été vu, tout n’a pas déjà été vécu et le cinéma revendique le droit de raconter une histoire universelle de manière singulière : en l’occurrence à la manière de Blanche, la protagoniste, interprétée par Virginie Efira, ou plutôt : doublement interprété par Virginie Efira qui incarne également la sœur jumelle de Blanche, Rose. Ce n’est pas un hasard si ce détail a été choisi pour figurer dans le scénario : les liens entre jumeaux homozygotes sont parmi les plus forts et les plus indissolubles et pourtant la rencontre avec Grégoire Lamoureux (Melvil Poupaud) parvient à s’insinuer également dans cette relation et à élargir toujours plus la distance entre les deux sœurs. Les noms des protagonistes révèlent un jeu de mots qui semble souligner combien il faut faire attention aux apparences: “l’amoureux” signifie en effet “l’amant”, tandis que le nom de famille de Blanche, “renard”, signifie “renard”, mais les rôles s’inversent rapidement. Ou peut-être que le petit renard ne voulait ni voir ni entendre ? « Je l’ai aimée jusqu’aux larmes que je lui ai fait verser » récite l’homme lors de la première nuit d’amour. Les câlins, les murmures, le contexte : tout semble parfait jusqu’à ce que arrivent des signaux subtils que seul l’épaississement de la répétition au fil du temps rend visibles.

Le courage de Blanche Virginie EfiraLe courage de Blanche Virginie Efira
LAMOUR-ET-LES-FORETS-©-2023-RECTANGLE-PRODUCTIONS-FRANCE-2-CINEMA-LES-FILMS-DE-FRANCOISE

Blanche n’est même pas libre d’annoncer à sa sœur jumelle le bonheur d’une grossesse, sans se rendre compte que le monde de l’homme dont elle est tombée amoureuse se referme autour d’elle sans issue. Comme les brises légères qu’on ressent dans les pièces aux fenêtres fermées sans comprendre d’où elles entrent, ainsi Blanche éprouve des doutes et des sensations qu’elle ne peut donner de nom et avance, jusqu’à se rendre compte que chaque fibre de son corps est saturée d’un inéluctable ce sentiment n’est plus de l’amour, mais plutôt l’étonnement de celui qui se retrouve à errer dans la forêt parce qu’il s’est égaré.

Le courage de se reconnaître victime

Dans l’une des scènes de violence les plus féroces du film, Blanche passe ses mains sur le dos des livres comme pour demander défense de toute la poésie et de la littérature dont elle s’est nourrie et qui ont fait d’elle une femme autonome, capable de comprendre le le monde et ses nuances. Pourtant, ni son éducation, ni son travail, rien de tout ce qu’elle a pu construire dans la vie n’a suffi à l’éloigner de l’horreur qu’elle vit.

Lui transmettre la conscience qu’elle s’abandonnait à l’amour plus qu’à son porteur et qu’elle en était désormais la victime. Victime : un mot que les femmes qui subissent des violences, notamment psychologiques, ont du mal à prononcer, à s’attribuer, car elles sont toujours accusées d’être coupables du malheur de l’homme qu’elles ne savent pas aimer assez. Assez : encore un mot important qui vient comme une libération quand quelqu’un, quelque chose, en nous, peut peut-être venir nous sauver. Du courage peut-être, avec l’espoir que chacun puisse retrouver le courage de Blanche.

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