Il n’existe pas de « droit » à l’aide médicale à mourir

Il n’existe pas de « droit » à l’aide médicale à mourir
Il n’existe pas de « droit » à l’aide médicale à mourir

Et le punir pénalement n’est pas contraire à la Charte des droits de l’homme.

1. Par un arrêt important publié hier, la Cour européenne des Droits de l’Homme a confirmé que les principes de la Convention européenne des Droits de l’Homme n’impliquent pas l’existence d’un « droit au suicide assisté », et a fortiori d’un « droit à mourir ».

La décision a rejeté l’appel du citoyen hongrois Daniel Karsai, dans des conditions de détérioration progressive, mais pas en phase terminale.

La loi hongroise punit l’aide au suicide et autorise le refus de soins de santé uniquement en cas de maladie en phase terminale immédiate. Le requérant se plaignait de ce que ce cadre réglementaire national ne lui permettait pas d’obtenir le soutien dont il avait besoin pour mettre fin à ses jours au moment qu’il jugeait le plus approprié selon sa libre autodétermination. Il a contesté en détail que cette limitation de l’autodétermination était en contradiction avec les principes conventionnels de respect de la vie privée et familiale, de non-discrimination, de liberté de pensée, de conscience et de religion, ainsi qu’avec l’interdiction de la torture.

La Cour a radicalement exclu l’existence de telles violations, confirmant la pleine conformité à la Convention européenne des droits de l’homme des réglementations nationales qui protègent le droit à la vie, interdisent le suicide assisté et fixent des conditions pour le refus des traitements salvateurs.

2. L’arrêt, qui confirme une jurisprudence consolidée de la Cour, revêt cependant une importance particulière en premier lieu pour confirmer qu’il n’existe pas de contraintes supranationales à l’introduction du suicide assisté : les choix en la matière relèvent de la liberté des Etats (paragraphes 145, 166).

Pour arriver à cette conclusion, la motivation de la décision apparaît particulièrement riche et intéressante et marque un tournant dans le débat jurisprudentiel sur le sujet, précisant qu’il n’est pas du tout nécessaire de prévoir des exceptions à l’interdiction du suicide assisté (paragraphes 159-163 ) et remettant ainsi en question des approches qui, au contraire, ont jugé légalement indispensable de discriminer les comportements d’aide au suicide dans certains cas particuliers (pensée à la Cour constitutionnelle, n° 242/2019).

La Cour européenne des droits de l’homme a examiné les profondes implications éthiques et sociales du suicide assisté, concluant que le sanctionner pénalement est « sans aucun doute » une mesure intrinsèquement légitime, dans la mesure où elle poursuit les objectifs tout à fait légitimes de protection de la vie des personnes vulnérables menacées. abus, pour maintenir la pleine intégrité éthique de la profession médicale et également pour protéger la moralité de la société dans son ensemble en ce qui concerne le sens et la valeur de la vie humaine (par. 137).

Ces larges implications sociales du sujet – souligne la Cour – peuvent différer en fonction des différentes valeurs qui caractérisent la vie civile des différentes communautés nationales, elles peuvent donc diverger d’un pays à l’autre et dans chacun elles sont « sans aucun doute » pertinentes et important. En fonction des valeurs des différentes communautés nationales, elles ne peuvent que relever de l’appréciation des autorités nationales (paragraphe 149).

Cette motivation repose sur un fait juridiquement et philosophiquement controversé, à savoir le fondement sociologique et historique, plutôt qu’objectif et intrinsèque, des valeurs inhérentes à la personne humaine, qui est également repris ailleurs dans la décision (par exemple par .167). Cependant, se plaçant dans cette perspective, aujourd’hui dominante, elle apporte des arguments particulièrement importants pour exclure toute obligation, mais aussi simplement toute opportunité, de normalisation au niveau supranational, et surtout européen, d’une série de sujets éthiquement sensibles, de celui de de la fin de la vie à celle de la maternité de substitution, en passant par cet avortement, que certains États étrangers tentent ces derniers jours de propager comme un droit universel.

En outre, la décision est importante dans la mesure où elle nie expressément certaines objections, comme celle relative à la prétendue disparité dans le traitement des malades dépendants de systèmes de réanimation par rapport à ceux qui pourraient décider de se suicider sans avoir recours à la collaboration de tiers. des soirées. La Cour a considéré que la différence de traitement juridique était justifiée par des raisons objectives et rationnelles (par. 176). Fonctionnel à la motivation de la décision, mais plus controversé, apparaît l’argument qui soutient une différence entre cet objectif de suicide assisté et la suspension des traitements de maintien de la vie : sur le plan causal, en effet, ils peuvent produire le même résultat, en la même manière d’euthanasie active et passive (par. 175).

3. Il apparaît tout à fait cohérent, dans ce contexte, de considérer le choix d’un État de sanctionner le suicide assisté comme pleinement rationnel et proportionné même s’il est commis à l’étranger, notamment lorsqu’un citoyen de l’État est impliqué. En effet, comme l’a observé la Cour, la cohérence intrinsèque entre les législations pénales nationales et les valeurs éthiques et morales sur lesquelles elles se fondent constitue une base raisonnable pour justifier l’exclusion de tout type d’exception à l’interdiction pénale du suicide assisté. et le fait de le punir même s’il est commis à l’étranger ne doit être considéré ni comme inhabituel ni comme excessif (paragraphes 160, 161).

Cette motivation confirme, entre autres, la pleine justesse, également au niveau supranational, du choix fait par le Parlement italien de qualifier la maternité de substitution de crime universel.

4. Enfin, les considérations que la Cour expose en réponse à certaines des objections de l’appelant concernant le sens de la souffrance humaine sont particulièrement importantes.

La Cour a fait preuve d’un véritable courage en reconnaissant que la souffrance « fait partie de la condition humaine et que la science médicale ne sera probablement jamais complètement capable de l’éliminer ». Une ouverture vers le mystère et le sens profond de la souffrance, et finalement de l’existence humaine, particulièrement appréciable à lire dans une phrase d’un si haut niveau. De cette manière, il est exclu que la souffrance d’un patient en phase terminale puisse, en tant que telle, créer une obligation pour l’État en vertu de l’article 8 de légaliser le suicide assisté, alors qu’au contraire l’état de vulnérabilité accru d’un patient malade en phase terminale, l’expression de ce mystère de la vie et de la souffrance auquel la sentence fait référence nécessite une approche profondément humaine, qui implique des soins palliatifs administrés inspirés par une profonde compassion et des normes médicales élevées (par. 158).

5. L’État italien est intervenu dans la procédure à l’appui des motifs de la Hongrie et le résultat de l’arrêt confirme qu’aucun argument ne peut être tiré du droit européen en faveur de l’introduction ou de l’expansion du suicide assisté.

Il s’agit d’un message particulièrement important au vu des décisions que la Cour Constitutionnelle devra prendre prochainement en matière d’art. 580 du code pénal italien.

Francesco Farri

Ci-dessous la phrase :

AFFAIRE-DANIEL-KARSAI-c.-HONGRIE

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