LA RENCONTRE – Deux livres pour lutter contre l’antisémitisme


Deux livres “pour comprendre et aborder l’antisémitisme d’aujourd’hui”.
Une initiative en ligne de l’association culturelle juive turinoise Anavim portera à l’attention du public deux textes récemment publiés. Il s’agit de L’ennemi idéal (Rai libri) de la journaliste du service public Nathania Zevi et de Sur les Juifs (éd. Bollati Boringhieri) par le directeur de la Fondation Cdec Gadi Luzzatto Voghera.
La réunion aura lieu sur la plateforme Zoom et est prévue le jeudi 27 juin à 21h15. Le professeur Asher Colombo, président de l’Institut Cattaneo de Bologne et professeur de l’université locale, discutera avec les auteurs. La réunion se terminera par une réflexion de David Sorani.
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Juifs et Israël, faux mythes et vrais préjugés

Un guide fluide, quelque peu provocateur et polémique, avec plusieurs allusions autobiographiques et en même temps historiquement documenté sur les Juifs, le judaïsme et Israël. Le directeur de la Fondation Cdec, Gadi Luzzatto Voghera, se rend à la librairie avec l’essai Sur les Juifs : questions sur l’antisémitisme, le sionisme, Israël et la démocratie (Bollati Bolinghieri) et vise à démanteler, face à face avec le lecteur, de nombreux préjugés et malentendus sur le monde juif. Il le fait en tant qu’historien, en clarifiant d’abord quelques notions de base et en soulignant à quel point la représentation des Juifs dans l’opinion publique est très éloignée de la réalité. « Le Juif est connu et reconnu sur la base de préjugés profonds et enracinés, alimentés par des idées la propagande bien plus que ce que l’on sait dans sa véritable identité culturelle et religieuse. Le Juif imaginé est très différent du Juif réel”, prévient Luzzatto Voghera.
En plus d’expliquer quelques concepts clés, l’historien fait quelques incursions dans d’autres domaines, de la littérature au théâtre en passant par le cinéma, pour expliquer le lien avec la culture juive. « La passion du monde juif pour la représentation scénique – théâtrale ou cinématographique – a des origines historiques solides et reconnaissables. Il faut remonter aux compagnies de théâtre juif de la Renaissance italienne, mais même dans les périodes ultérieures, il existe une certaine sensibilité, peut-être favorisée par le rituel traditionnel qui comprenait des moments de joie conviviale notamment lors de la fête de Pourim (le “carnaval juif”), souvent animé par des sketches et des formes réelles de jeu d’acteur”, écrit Luzzatto Voghera.
Une analyse plus large est consacrée à la politique et surtout au sens de l’aspiration sioniste, à ses courants, à sa réponse à l’antisémitisme de plus en plus virulent de la seconde moitié du XIXe siècle. Le sionisme voulait « créer une nouvelle forme d’État dans laquelle les Juifs eux-mêmes pourraient se réfugier et organiser leur vie sociale, économique et culturelle, y compris leur vie religieuse, sans conditionnement extérieur. C’était un mouvement dont les caractéristiques étaient à l’origine très similaires à celles du Risorgimento italien.
La déformation du sens historique du sionisme, rappelle Luzzatto Voghera, a fait ses premiers pas dans la Russie soviétique stalinienne. Ici, le régime a transformé un mouvement d’autodétermination nationale en un « instrument imaginatif et de propagande des lobbies financiers au service de l’impérialisme américain » au détriment de la liberté des peuples du Moyen-Orient. Une rhétorique, Luzzatto Voghera et les recherches de l’Observatoire de l’antisémitisme CDEC nous le rappellent, encore très présentes aujourd’hui, quoique sous des formes adaptées au contexte actuel.
Une rhétorique avec laquelle l’historien aime argumenter dans la deuxième partie du livre, construite comme une question et une réponse à certaines des déclarations antisémites, complotistes ou simplement ignorantes les plus populaires liées aux Juifs et à Israël. Par exemple, un chapitre s’intitule : « Je ne suis pas antisémite, je suis antisioniste ! Et je ne peux pas être antisémite, car les premiers Sémites sont précisément les Arabes et les Palestiniens. » L’auteur répond à cette phrase comme s’il se trouvait devant un véritable interlocuteur. Et il démonte pièce par pièce les clichés de ceux qui épousent cette thèse qui a trouvé un écho dans les universités italiennes.
En plus de réfuter l’idée selon laquelle l’antisémitisme indique une opposition aux peuples sémitiques – si tel était le cas, il faudrait considérer comme vraie la fausse théorie de la division raciale – Luzzatto Voghera précise que se qualifier d’antisioniste signifie « s’opposer à l’idée » que les Juifs ont le droit à « l’affirmation d’un État politique ». Le voyage du livre se poursuit dans la déconstruction d’autres mythes plus ou moins haineux, avec de nombreuses références et liens entre la culture, les juifs et l’Italie. Une manière efficace de rappeler au public combien les communautés juives font partie intégrante de l’histoire nationale.
L’auteur semble avoir pris plaisir à construire cet essai : un dialogue franc et ouvert avec le lecteur, utile dans les moments de grands malentendus.

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